BETTELHEIM, Bruno, Psychanalyse des contes de fées, New York, Éditions Robert Laffont, coll. Pluriel, 1976. 

Cet ouvrage est très intéressant quant au rôle que jouent les sorcières dans l’imaginaire des enfants. Il aborde le développement des notions du mal et du bien dans le jeune cerveau.


Voici un lien vers un balado de Serge Savard, anthropologue, qui raconte l’histoire des sorcières, « ces femmes totales, fatales, que la raison mâle a cherché à réprimer ».

https://ici.radio-canada.ca/premiere/emissions/recit/segments/entrevue/124234/sorcieres-inquisition-deesse-mere-chasse-bucher-salem

« Le monde est passé des rondeurs des femmes […] au monde pointu et phalliques des mâles dominants. »

 -Serge Bouchard

Tableau représentant une femme attachée sur un bûcher et entourée de gens qui la regardent.

Jeanne D’Arc sur le bûcher Photo : domaine public


Une sorcière est une femme qui est inutile au pouvoir patriarcal : celles qui freinent ce pouvoir sont encore plus dangereuses.


Voici un article qui traite de la sorcière en tant que nouvelle figure féministe.

https://www.lofficiel.be/art-culture/la-sorciere-nouvelle-figure-feministe

« Du bûcher au piédestal, comment la figure de la sorcière est devenue une égérie pop, engagée et ultramoderne. »

-Violaine Schütz

“La sorcellerie est la religion de la terre, c’est la spiritualité de l’anima mundi, l’âme du monde.”

Amanda Yates Garcia


« Or le merveilleux réside aussi dans la croyance naïve, dans une foi tellement spontanée et sûre d’elle qu’elle fait partie de l’homme. »

-Colette Arnould

Les dogmes du pêché originel et celui de la rédemption se confrontent à la liberté. La femme, que l’on associe à la cause du pêché originel, symbolisant la tentation, est par la suite, au Moyen Âge, associée au Diable.

Hérésie
Définition : toute croyance contraire aux dogmes catholiques. 

L’association entre l’hérésie et la sorcellerie est un moyen infaillible pour condamner ces « sorcières ».

La suspicion nait du refus de la différence.

La pensée médiévale allait à l’encontre de la véritable connaissance ; elle se basait sur l’analogie « ciel, terre et homme ». La religion, et donc la pensée qui en découle, est d’abord symbolique.

Les accusations de sorcellerie sont basées sur peu de choses, le moindre détail qui relève d’une pratique peu commune ou d’un trait physique hors de l’ordinaire est déformé en lui attribuant une symbolique subjective provenant de l’imagination.

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L’imaginaire commun préfère le domaine des représentations, de la perception du monde qui nous entoure, plutôt que la réalité factuelle s’appuyant sur des observations. Nous avons tendance, en tant qu’êtres humains, à confondre le produit de notre imagination et la réalité.


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Circée la magicienne, fille d’Hélios. Elle symbolise le charme, la séduction et la douceur. Dans L’Odyssée, elle transforme Ulysse et ses compagnons en cochons.
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Médée la magicienne, meurtrière. Elle symbolise la vengeance, la passion et le drame.

Ces deux figures mythiques s’unissent dans la création mentale et collective de la figure de la sorcière.


Au Moyen Âge, le sentiment continuel d’inquiétude, nourrit par la peur de l’apparition de l’Antéchrist, de la fin du monde et du Jugement dernier provoque une méfiance dans la population. La peur est l’arme ultime d’une institution dans son combat pour contrôler une large population.


La condamnation morale seule a très peu d’effet sur la transformation des mœurs. Avec l’Inquisition, ce qui était de l’ordre moral devient judiciarisé. Lorsque l’Était va prendre en partie contrôle de l’Inquisition, l’hérésie ne sera plus seulement ce qui va à l’encontre de l’Église, mais aussi ce qui va à l’encontre de l’État.


« La chasse aux sorcières fut une guerre contre les femmes : c’était une tentative concertée pour les avilir, les diaboliser et pour détruire leur pouvoir social. En même temps, c’était dans les chambres de torture et sur les bûchers sur lesquels les sorcières périssaient que les idéaux bourgeois de la féminité et de la domesticité furent forgés. »

-Silvia Federichi

La figure de la sorcière est indissociable, dans l’imaginaire collectif, des animaux (crapauds, chouettes, chèvres…). Par cette association, la femme et sa sexualité dans le but autre que la procréation ont un caractère bestial, les bêtes symbolisant les instincts humains, ceux que l’on qualifie « d’animal », car ils ne sont guère explicable par la Raison, et sont plutôt de l’ordre de l’impulsion ou du besoin. Ce parallèle entre les femmes et les animaux est une hypothèse quant à l’une des causes de la chasse aux sorcières : elle est étroitement liée au capitalisme. Comme le bœuf est utile pour sa viande et sa peau, la femme est utile à l’enfantement, donc à la création de main-d’œuvre. Ce désir de contrôler la Nature, qui est intrinsèque au capitalisme, de l’homme va pousser celui-ci en prendre le contrôle de la reproduction, de l’accouchement, en marginalisant les sages-femmes : en perdant le contrôle sur la reproduction, les femmes sont expropriées de leur corps.


Selon le texte d’Armelle Le Bras-Choppard, à la fin du XVe, la place de la femme était grandissante.

Les sorcières sont un enjeu de pouvoir entre l’Église et l’État.

Lorsque l’État veut affirmer sa souveraineté, il fabrique un sujet obéissant. On assiste au passage de la foi à la loi.

L’homme a peur de la femme, s’il l’avait considéré comme inoffensive, il n’y aurait eu aucun acharnement. Il la considère comme inconstante, c’est ce caractère hasardeux, caractéristique associée au Diable, qui lui fait tant peur. En brûlant les sorcières, l’homme tente de contrôler cette « Fortuna ».

L’état moderne et la famille sont étroitement liés. Le chef de la famille est le père, et le pouvoir de ce chef est intemporel et n’est jamais remis en question. Les familles dysfonctionnelles sont-ils le miroir de la société moderne, elle aussi dysfonctionnelle?


Dans le capitalisme, la séparation entre le travailleur et les moyens de production et la même qu’entre la femme et son corps.

La répression physique des sorcières n’est plus nécessaire à partir du moment où la loi rend la femme obéissante.


La sorcière est la victime des hommes modernes et non des anciens comme on a tendance à le croire.

Les protestants ont autant participé à la chasse aux sorcières que les catholiques.

« Elles illustrent d’abord l’entêtement des sociétés à désigner régulièrement un bouc émissaire à leurs malheurs. »

-Mona Chollet

La chasse aux sorcières a beaucoup en commun avec l’antisémitisme : sabbat, nez crochu, figure menaçante pour la chrétienté.

On croyait que la sorcellerie était héréditaire.

Chaque comportement et son contraire peuvent être raison de soupçon : lien à faire avec Circée et Médée.

« Les chasseurs de sorcières se montrent à la fois obsédés et terrifiés par la sexualité féminine »

-Mona Chollet

L’argument de la « nature » alimente la position de la femme dans le couple hétérosexuel. Il est fou de penser que même encore aujourd’hui, il n’y a pas de table à langer dans la plupart des salles de bain pour hommes.

« Mais il faut aussi parler de ce sentiment d’obsolescence programmée, de cette hantise de la péremption qui marque toute l’existence des femmes et qui leur est propre : on imagine mal un homme se rouler par terre le soir de ses vingt ans en gémissant qu’il est vieux. »

-Mona Chollet

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