L’art a toujours été en dialogue avec la culture et nos mœurs sociaux. D’une part, l’art est l’expression de notre culture. Par exemple, les tags et autres graffitis représentent de façon non censurée les impulsions de notre époque. Et d’autre part, l’art influence notre perception de la société, notre perception de l’autorité, de la souffrance, des minorités, de la beauté, etc. C’est ainsi que l’art a longtemps été un outil de contrôle pour les autorités politiques. C’est à travers celle-ci qu’ils véhiculaient leurs valeurs, leurs supériorités et distrayaient la population à leur avantage. L’ampleur d’une église majestueuse, par exemple, aurait été assez pour convaincre n’importe qui de la puissance de son créateur, de la même façon qu’une statue ou un tableau met en valeur cette autorité. L’emprise de l’art s’est graduellement décentralisée avec le temps, pour une forme de démocratie intéressante aujourd’hui qui inclue l’art activiste. Comment l’art a-t-il évolué pour occuper la place qu’il a aujourd’hui? Comment la variété de culture et d’expérience tel le Hip Hop ont pu faire partie de cette évolution?

Pour moi, l’art occupe une place nécessaire dans mon quotidien. Il offre en effet une place de penser, d’exister et de voir le monde à l’extérieur de mon quotidien. Dans celui-ci, un monde rationnel, je suis objectivement juste un autre humain qui marche dans la rue comme tout le monde, qui subit et qui suit un système, qui va à l’école et qui rentre chez moi le soir. Je peux être heureux et souffrir comme tout le monde, mais ces émotions passent inaperçus et ne sont pas importantes. Or, l’art me donne ce sentiment d’importance. Car souvent il m’engage à prendre fierté dans tout ce qui m’est marginal et dans toute la force qui transparaît de lui. Je pourrais être absolument rien du tout, mais l’expérience viscéral de l’art englobe mon univers et fait de moi quelqu’un de grand et d’important à l’intérieur de cette expérience. Encore plus fort, c’est que la popularité de certaines œuvres soulève qu’il y a une universalité aux sentiments qui nous émeut. À travers cette section du cours, il m’est devenu clair que le Hip Hop jouait également sur ces sentiments transmis par l’art et qui avançaient davantage des messages politiques pour le bien de la communauté afro-américaine. Dans ce contexte d’art politique, des chansons passionnées qui porte la justesse du sentiment que les artistes veulent transmettre résonnent comme sentiment universel. Cette culture plaît aux blancs et prend de l’ampleur à l’intérieur de la culture blanche. À l’intérieur de cette culture, véhiculé dans la culture blanche, des messages de révoltes et d’activismes circulent aussi, ce qui donne une grande plateforme pour l’activisme contre le racisme.

Dans cette nouvelle vision démocratique qui soustrait le pouvoir aux institutions formelles, tout le monde a le potentiel d’être artiste, car tout autour de nous a le potentiel d’être œuvre d’art comme le défendent si bien Duchamp et Warhol (dans le concept du « ready-made »). Aujourd’hui, tout le monde qui possède un téléphone mobile dans sa poche peut prendre une photo de ce qui semble digne d’intérêt et en devient l’artiste de son œuvre. De plus, l’espace public peut également prendre l’importance d’un musée aujourd’hui, et tout le monde y a accès. Par exemple, le jeune Jean-Michel Basquiat, avec des amis, crée la fameuse étiquette de rue « SAMO » (voulant dire « same old shit »). Les messages véhiculés questionnent la société dans lequel Basquiat évolue et grandit. Dans ce monde où tout peut être art, le nouveau critère de l’art « bon », c’est qu’il doit maintenant présenter une sincérité personnelle de la part de l’artiste. L’artiste devient une marque en soi. L’artiste se vend alors selon l’idéal, selon la marque qu’il se crée. Dans cet univers qui lui devient personnel, son art a la chance de plaire globalement. De plus, les plateformes de médias sociaux favorisent la divulgation et promeuvent la célébrité instantanée.

De même, tout le monde aujourd’hui devient consommateur d’art. Chaque achat implique un artiste quelconque, vendu par un idéal, une marque fabriquée pour un profit, pour une romantisation de notre achat et de notre temps. Que ce soit le personnage de Kim Kardashian, la maison Gucci ou le pâtissier local sur son compte Instagram.  Dans une démocratie artistique où les élus ne dépendent plus autant des institutions, la popularité dépend de la masse. C’est ainsi que l’art se décentralise et donne de plus en plus de voix aux artistes au contre-courant d’une institution dominante. L’avènement des réseaux sociaux est un catalyseur important dans ce phénomène. C’est à l’intérieur de cette société capitaliste que l’art évolue le mieux aujourd’hui et qu’elle est devenue aussi démocratique, on pourrait le croire. Le rêve américain semble être à la portée de tout le monde.

Le nouvel enjeu aujourd’hui c’est qu’à l’intérieur de ce système capitaliste de l’art, il faut toujours crier plus fort que son compétiteur, ce qui stresse l’artiste à devoir créer toujours en plus grande quantité dans un monde jetable au rythme rapide, plutôt que de créer avec temps, soin et approfondissement. C’est le commerce, l’autorité commerciale, d’aujourd’hui qui a pris empire sur l’art en contraste à l’autorité politique d’autrefois. On semble chercher à monétiser tout ce qui semble vendre, plutôt que d’offrir ce qui est véritablement authentique de la part de l’artiste. L’intégrité de la quête de l’artiste contemporain est alors fragilisée. Dans le monde de la mode, chaque choix est calculé pour le profit maximal. Une décision éthique se fait seulement lorsqu’elle est rentable, lorsqu’il y a une demande pour cette dernière. On dirait alors que l’artiste devient dépendant de son client comme ce client est dépendant de l’artiste. Cet échange peut faire de l’art quelque chose de plus ou moins engagé, mais le consommateur a une part énorme à jouer. L’art est maintenant une conversation entre le créateur et son consommateur.

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