- La figure de la sorcière – Éthique et politique – Rémi Laroche
- Rosalie Mouton – 5 Mars 2024
The Wicked Witch Of The Left
“Male politicians need to stop using the phrase “Witch Hunt” Witch Hunts revolved around misogynistic laws, designed to kill women. The phrase should not be used to describe authoritative men”
« Les hommes politiques doivent cesser d’utiliser l’expression ‘chasse aux sorcières’. Les chasses aux sorcières tournaient autour de lois misogynes, conçues pour tuer les femmes. Cette expression ne devrait pas être utilisée pour décrire des hommes autoritaires. » (Source 4)
L’association des femmes aux sorcières remonte à plusieurs siècles et a été utilisée comme un outil de répression contre celles qui osaient s’exprimer et s’affirmer dans la société. Au cours de l’histoire, cette association a été exploitée pour justifier la marginalisation, la persécution et même l’exécution de nombreuses femmes. Pendant les grandes chasses aux sorcières qui ont eu lieu aux XVIe et XVIIe siècles, des milliers de femmes ont été accusées de pratiquer la sorcellerie et ont été victimes de violences et de tortures. Ces chasses aux sorcières étaient souvent encouragées et orchestrées par des autorités politiques et religieuses qui cherchaient à maintenir leur pouvoir en réprimant toute forme de contestation, en particulier de la part des femmes. Même après la fin officielle des chasses aux sorcières, l’image de la sorcière est restée associée à la peur, à la méfiance et à la répression des femmes. Aujourd’hui, cette utilisation des archétypes de sorcières persiste dans notre culture contemporaine. Dans quelles mesures les hommes politiques et les personnalités médiatiques dominantes s’approprient ces stéréotypes pour rabaisser ou dénigrer les femmes qui les défient ou les critiquent?
(image Hillary Clinton)
Utilisation des archétypes de sorcières pour dénigrer les femmes critiques
Les archétypes de sorcières sont associés à des femmes qui défient les normes sociales et les structures de pouvoir établies. Dans le contexte des sorcières, les archétypes se réfèrent aux représentations courantes et reconnaissables de ces figures dans la littérature, la mythologie, les contes de fées, et d’autres formes de culture populaire. Cette association entre les femmes libres et autonomes et le concept de sorcellerie a alimenté les stéréotypes misogynes selon lesquels les femmes qui ne se conforment pas aux attentes sociales sont dangereuses ou maléfiques ou diaboliques.
Les hommes politiques et les personnalités médiatiques utilisent des archétypes ou métaphores de sorcières pour dénigrer et déconsidérer les femmes qui s’opposent à eux ou qui défient l’autorité établie. Par exemple, Donald Trump, en tant que président des États-Unis, a été célèbre pour son langage incendiaire et ses attaques verbales contre ses opposantes féminines. Par exemple, lors de la campagne présidentielle de 2016, il a qualifié Hillary Clinton de « sorcière » ou “The wicked witch of the left” à plusieurs reprises, notamment lors de débats télévisés et sur les réseaux sociaux. Néanmoins, Hillary Clinton n’est pas la seule à avoir été visée par de telles attaques agressives. D’autres femmes politiques, telles que Nancy Pelosi, Kamala Harris et Alexandria Ocasio-Cortez, ont également été qualifiées de « witches » dans des tentatives désespérées de les dépeindre comme des figures maléfiques assoiffées de pouvoir. Ces attaques sexistes et misogynes visent à les réduire au silence.
(Image Nancy Pelosi)
De même, Brett Kavanaugh, lors de son audition au Sénat américain pour sa nomination à la Cour suprême en 2018, a été confronté à des allégations d’inconduite sexuelle. Pendant les audiences, il a utilisé des termes tels que « chasse aux sorcières » pour décrire les accusations portées contre lui. Pareillement, en 2017, le directeur Woody Allen se prononce au sujet de la vague de dénonciations des crimes sexuelles de Harvey Weinstein, affirmant que ce dernier est victime d’une “Witch Hunt”. “Male politicians need to stop using the phrase “Witch Hunt” Witch Hunts revolved around misogynistic laws, designed to kill women. The phrase should not be used to describe authoritative men”(Source 4).Cette phrase fait référence à une période historique marquée par la persécution des femmes accusées de sorcellerie, souvent caractérisée par des lois discriminatoires ayant entraîné le meurtres de multiples femmes
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Normalisation de la misogynie et de la discrimination
“The central paradox of modern witch hunts is that those who claim to be the victims are often the ones most enthusiastic about carrying them out” ( Source 5 ) En d’autres termes, ceux qui se plaignent d’être persécutés ou injustement traités sont souvent ceux qui sont les plus actifs dans la persécution des autres. Sur le plan collectif, cette stigmatisation contribue à perpétuer les préjugés sexistes et à marginaliser les voix féminines dans la sphère politique. En associant les femmes critiques à des figures maléfiques ou irrationnelles, les discours politiques et médiatiques alimentent l’idée selon laquelle les femmes sont incapables de participer de manière constructive au débat démocratique. Par conséquent, cela nuit à la diversité des opinions et affaiblit la démocratie en éliminant la légitimité des femmes dans la sphère politique. Les conséquences politiques et sociales de la normalisation de la misogynie sont vastes et variées. Sur le plan politique, cela se traduit par des politiques publiques qui ignorent ou minimisent les besoins et les droits des femmes, ainsi que par une sous-représentation des femmes dans les instances décisionnelles. Sur le plan social, cela crée un environnement où les femmes sont systématiquement marginalisées et discriminées, ce qui limite leurs opportunités d’avancement professionnel, leur accès aux services de santé et leur participation à la vie publique. De plus, cela contribue à maintenir une culture de silence au sujet des violences faites aux femmes, démolissant ainsi les efforts afin d’assurer la sécurité et le bien-être des femmes dans la société. ”A witch transgresses norms of female power – punishing her makes others afraid to follow in an unruly woman’s footsteps” (Source 3)
(Image Hillary Clinton)
Conclusion
Les chasses aux sorcières et les procès ont conduit à la torture, à l’humiliation et à la mort de milliers de femmes. Les médias, la culture populaire, les institutions et les structures sociales jouent tous un rôle significatif dans la diffusion et la perpétuation de stéréotypes sexistes, contribuant ainsi à la marginalisation des femmes et à la restriction de leurs opportunités. Cette normalisation de la misogynie et de la discrimination a des conséquences profondes pour les femmes, perpétue les inégalités structurelles et renforce les systèmes de pouvoir patriarcaux qui limitent le progrès vers une société plus juste et égalitaire. En définitive, pour créer un avenir où la misogynie et la discrimination ne sont plus acceptées ni tolérées, il est impératif de continuer à sensibiliser, à éduquer et à mobiliser les individus et les communautés. Pour construire une société plus juste et égalitaire, il est essentiel de remettre en question ces représentations stéréotypées et de promouvoir une culture qui valorise la diversité, le respect, l’inclusion et l’abolition du patriarcat.
Médiagraphie
- Virginie Larousse, 2020. De la diabolisation des femmes aux bûchers de sorcières
- Médiapart, 2019. « La société chasse encore des sorcières aujourd’hui »
- Madeline Miller, 2018. From Circe to Clinton: why powerful women are cast as witches | Books | The Guardian “Une insulte misogyne à Washington et Westminster, une force pour le bien à Hollywood… depuis des siècles, les sorcières ont personnifié la peur des femmes assertives. Mais pourquoi ce stéréotype persiste-t-il?” by Madeline Miller
- Katie Anderton, 2020. Male politicians need to stop using the phrase “Witch Hunt” | by Katie Anderton “Male politicians need to stop using the phrase “Witch Hunt” Witch Hunts revolved around misogynistic laws, designed to kill women. The phrase should not be used to describe authoritative men”
- Q. Annalisa, 2017. How Did ‘Witch Hunt’ Become the Complaint of the Powerful? – The New York Times
- Michelle D. Brock, 2017. https://www.washingtonpost.com/news/made-by-history/wp/2017/10/18/no-there-is-no-witch-hunt-against-powerful-men/
- RTS – Radio Télévision Suisse, 2020.RTS – Radio Télévision Suisse
- RTS – Radio Télévision Suisse, 2020. Sorcellerie : le crime imaginaire aux 100’000 victimes