«La municipalité, pour protéger un club de golf privé qui veut s’agrandir sur des terres publiques, est en train de créer un climat de violence dans notre village que ni les Mohawks résidents ni les Blancs, nous ne voulons.»

  • Citoyen d’Oka

Notre gouvernement canadien actuel descend d’un peuple colonisateur. En arrivant aux Amériques, il a imposé sa supériorité aux Premières Nations qui y habitaient déjà depuis des millénaires tout en réquisitionnant des terres pour établir ses colonies. Au fil du temps, la gourmandise de l’État envers les territoires autochtones n’a malheureusement pas diminué. À plusieurs reprises, le pouvoir en place a tenté de s’emparer des terres ancestrales des Premières Nations pour ses propres intérêts (souvent économiques). Personnellement, je trouve cela aberrant qu’un peuple s’autorise à prendre possession des biens d’un autre. À travers l’emprisonnement des Premières Nations dans des réserves et les événements de la crise d’Oka, je tenterai donc d’analyser le sentiment d’indignation qui m’habite.

D’abord, il est important de comprendre les motivations qui ont poussé l’État à s’approprier les terres des autochtones et à les regrouper volontairement dans des réserves. Comme je l’ai dit plus tôt, l’incitatif principal est économique. En effet, au XVIIe siècle, les immenses territoires de chasse des Premières Nations ont une valeur monétaire très importante à cause de la quantité faramineuse de bois qui s’y trouve ainsi que des peaux de gibier, très prisées à cette époque. Le gouvernement souhaitant exploiter rapidement ces ressources, la coupe à blanc et la chasse intensive deviennent des pratiques courantes. Plus tard, ce sont les mines et les rivières pour l’hydro-électricité qui poussent les gouvernements à vouloir garder le contrôle sur ces territoires. Évidemment, ces techniques d’exploitation ne sont pas durables et ne permettent pas à la nature de se régénérer. La conséquence principale en ce qui a trait aux cultures autochtones est donc une destruction de leur territoire de chasse et une raréfaction du gibier. La nourriture se faisant de plus en plus rare, une grande famine se met peu à peu à ravager les Premières Nations. Pour pallier le problème qu’il a lui-même créé, l’État instaure donc des «bons de nourriture» qui permettent à chaque clan d’obtenir des victuailles. Cependant, pour avoir accès à ces bons, les autochtones devaient obligatoirement se regrouper en bandes (dans les réserves) et élire un chef qui les représenterait. Cette «solution» crée donc un autre problème puisque les Autochtones, incapables de se nourrir de façon autonome, deviennent entièrement dépendants de l’État pour survivre.  Bref, le gouvernement, contrôlé par les enjeux et la croissance économiques, a engendré une terrible famine qu’il était obligé de régler. Pour ce faire, il n’a pas laissé d’autre choix aux Autochtones que de délaisser l’entièreté de leur mode de vie traditionnel pour s’entasser dans des réserves. Je ne peux pas m’empêcher de me révolter intérieurement contre les actions posées par notre gouvernement. J’y vois un manque de considération cruel envers les terres ancestrales et le mode de vie des cultures autochtones en plus de ressentir un certain malaise puisque je suis moi-même issu de ce peuple colonisateur. En effet, malgré le fait que je ne sois pas personnellement responsable de cet état de fait, je ressens une honte et une culpabilité grandissante puisque je descends du peuple qui a commis ces atrocités.

Du côté de la crise d’Oka, qui s’est déroulée du 11 juillet au 26 septembre 1990, le gouvernement n’a pas été plus empathique face à la réalité des Premières Nations. Cet événement, beaucoup plus récent, est un autre exemple poignant du manque de compassion profond de l’État envers certaines terres sacrées. Encore une fois, l’incitatif principal était économique puisque le projet envisagé visait à construire une soixantaine d’habitations luxueuses et à agrandir un terrain de golf. Évidemment, les promoteurs immobiliers n’avaient pas à cœur la préservation du cimetière et des terres ancestrales sur lesquelles allait s’étendre leur projet. Pour contester cette décision, plusieurs activistes mohawks décident, poussés par leur communauté, d’ériger de nombreux barrages sur des axes routiers importants. Au lieu de reconsidérer le projet immobilier, le gouvernement a fait appel à la Sûreté du Québec et même à l’armée canadienne pour régler cette crise par la force. C’est l’aspect de la crise d’Oka qui m’indigne le plus. Je n’arrive pas à croire que la première solution mise de l’avant par le gouvernement pour régler cette crise fut l’utilisation de la violence. Pour moi, les demandes des Warriors (les militants mohawks) étaient tout à fait légitimes et je trouve que la réaction de l’État est lâche. Suite à mes recherches sur cet événement marquant de l’Histoire du Québec, mon indignation face aux décisions du gouvernement est plus forte que jamais.

D’ailleurs, pour certains, une indignation aussi intense peut être un moteur d’action, une motivation pour faire changer les choses. Malheureusement, en toute honnêteté, je suis forcé d’admettre que mon indignation personnelle envers cette cause ne suffira pas à ce que je devienne un militant. La raison est simple, le militantisme représente un investissement de temps considérable et je ne suis pas assez impliqué personnellement dans cette cause pour y consacrer suffisamment de temps. De plus, je ne serais pas en mesure de mettre de côté mes ambitions pour militer avec ferveur pour une cause qui ne me concerne pas directement. Ce raisonnement peut paraître égoïste et individualiste, mais selon moi, il y a trop de causes à défendre pour une seule personne. Il faut obligatoirement choisir ses combats. Bref, je suis pris dans un dilemme moral et éthique entre la poursuite de mes rêves et mon devoir de m’insurger contre les injustices de ce monde. 

Pour conclure cette analyse, il serait intéressant de s’attarder au rôle joué par nos institutions dans la transmission des événements historiques concernant les peuples autochtones. Dans les dernières années, on observe heureusement un effort de la part du gouvernement pour reconnaître les torts qu’il a commis dans le passé. Personnellement, je crois que nos institutions (en particulier le système d’éducation) peuvent contribuer à cet effort de reconnaissance. En informant la population (surtout les jeunes) des atrocités qu’ont subies les autochtones, notre société pourra militer collectivement afin de renouer et de rendre aux Premières Nations ce qui leur revient. Grâce à l’éducation, je suis persuadé qu’il sera possible, un jour, de se réconcilier avec les peuples autochtones.

1054 mots

Sources :

Louise Beaudoin, «Le 26 septembre 1990 se terminait la crise d’Oka», 10 juillet 2020, dans Radio-Canada

https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1718260/crise-oka-warriors-mohawks-kanesatake-kanahwake-autochtones-archives (consulté le 8 décembre 2023)

Fred Glover, «Traite des fourrures au Canada», 15 janvier 2020, dans L’Encyclopédie Canadienne, https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/traite-des-fourrures-au-canada-resume-en-termes-simples#:~:text=La%20traite%20des%20fourrures%20a,chapeaux%20de%20fourrure%20en%20Europe. (consulté le 15 décembre)

 Alexi Riopel et Antoine Béland, «La crise d’Oka, jour par jour», 9 juillet 2020 dans Le Devoir, https://www.ledevoir.com/documents/special/2020-07-09-crise-oka-jour-par-jour/index.html (consulté le 10 décembre 2023)

Laisser un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *