
La politicologue Armelle Le Bras-Chopard ainsi que l’activiste féministe Silvia Federici ont émis plusieurs hypothèses afin d’expliquer la représentation de la femme comme étant une sorcière ainsi que de toute la violence qui en a découlé au fil des années. Dans leurs hypothèses qui se complètent, les deux ont cherché à comprendre pourquoi les femmes sont depuis aussi longtemps victimes de violence et réellement des boucs émissaires dans la société. Armelle insiste sur le transfert de la lutte de pouvoir entre l’Église et l’État vers une lutte de pouvoir entre l’homme et la femme. L’homme va avoir l’autorité sur la femme, il sera le sujet et elle l’objet. Avec la souveraineté de l’État par rapport à l’Église est aussi arrivée la science moderne; l’homme va être amené à voir et à représenter son monde d’une autre manière; par lui-même et sans l’influence de Dieu. Il va vouloir domestiquer son environnement, la nature, en être « maitre et possesseur », comme le dit Descartes. Cela va aussi contribuer à la violence envers les femmes, toujours selon Le Bras-Chopard. Avec la connaissance abstraite et scientifique de la nature on a formé le domaine abstrait de la nature, qui comprend toutes les choses qui appartiennent à la nature. On considérait que la femme faisait partie de ce domaine; elle était étudiée comme on étudierait un animal. Si on revient au discours de la méthode de René Descartes, être maitre et possesseur de la nature impliquerait donc d’être maitre et possesseur de la femme; l’assujettir à la domestication, l’étudier, et donc de faire d’elle un objet soumis aux regards des sujets pensants, plutôt qu’un sujet pensant et avec une conscience elle-même, ce qui expliquerait les années de violence, d’objectification et d’exploitation de la femme.
Cette réflexion m’en a amené à une autre; si les femmes ont vécu toutes sortes d’oppression parce qu’elles faisaient partie du domaine de la Nature, est-ce qu’on peut considérer qu’il en est de même pour l’environnement, qui fait aussi partie du domaine? Est-ce qu’on peut, comme dans le cas de la femme, nommer la domination de l’homme comme cause aux « violences » infligées à la Terre? Je dis « violences » puisqu’il ne s’agit pas littéralement de violence, mais je trouve adéquat de le considérer ainsi. La destruction de la Terre et de ses écosystèmes causée par le réchauffement climatique, je considère ça de la violence. Pour en revenir à la question de ma réflexion, j’estime que oui, que les femmes ainsi que la Terre souffrent du même oppresseur; l’homme.

La problématique de la représentation a un rôle à jouer dans cette imbrication. Si la femme était un bouc émissaire, c’est en partie à cause de sa mauvaise représentation dans la société. Même avant le transfert de pouvoir de l’Église à l’État, la femme était mal vue. Elle était associée, par l’Église, au pêché à cause de l’histoire d’Adam et Ève et on voulait s’en débarasser. Cette représentation en a mené à d’autres, comme celle des sorcières et puis, lorsque l’État est devenu souverain par rapport à l’Église, se fut au tour de l’homme de représenter son monde comme il le voulait. Avec ce point, je reviens à la question de domestication. C’est avec une représentation abstraite que l’homme est parvenu à créer le domaine de la Nature auquel il a ajouté la femme, assujettissant ainsi la femme et la nature.
On voit également l’imbrication des deux problématique dans la manière dont les deux parties sont traitées. La femme a longtemps été vue comme un objet et limitée à son corps; elle sert à la reproduction ou bien elle est vue comme un moyen de satisfaire l’homme et ses désirs sexuels. Il en est de même pour les animaux; ils sont limités à leur corps, qui va servir à combler le besoin de l’Homme de se nourrir, ou bien qui va servir à faire une paire de chaussures, un sac, un beau manteau. Et qui va s’enrichir de la vente de ces produits? L’homme, encore. Il va traiter la femme autant que les animaux comme des objets, des êtres sans conscience qui n’ont aucun autre sens que celui qu’il leur donne. L’homme va s’approprier les ressources de la Terre, comme le pétrole par exemple, détruire l’environnement pour le puiser, et ensuite l’utiliser en abondance malgré les répercussions horribles que cela a sur la planète. Le système économique en fait de même; il exploite la femme en la rémunérant moins que l’homme dans le milieu du travail et il exploite, voire même surexploite, les ressources de la planète Terre. Les luttes féministes et environnementales sont donc les deux des résultats de la domination de l’homme. Aujourd’hui, si la femme est toujours perçue inférieure à l’homme ou hypersexualisée c’est parce qu’elle a été assujettie par l’homme. Si la Terre se meurt à cause de l’activité humaine, c’est parce qu’elle a été assujettie par l’homme. Il a fait ce qu’il voulait de ces deux parties, soit la femme et la Terre, et depuis on en vit les conséquences.
« de la même façon ou il y a séparation entre le travailleur et les moyens de production dans le contexte du capitalisme, il y a aussi et surtout séparation pour la femme entre elle-même et son propre corps. »
Cette citation tirée du site vient associer le capitalisme au traitement des femmes, rejoignant Silvia Federici dans son hypothèse. On peut associer cela à la crise environnementale aussi, avec le même exemple cité au dessus; « il en est de même pour les animaux; ils sont limités à leur corps, qui va servir à combler le besoin de l’Homme de se nourrir, ou bien qui va servir à faire une paire de chaussures, un sac, un beau manteau. Et qui va s’enrichir de la vente de ces produits? L’homme, encore. » L’animal, séparé de son propre corps, va devenir un repas ou un accessoire, plutôt qu’un être vivant en soi.
Finalement, je crois qu’aujourd’hui il est facile de voir à quel point les luttes féministes et environnementales s’imbriquent. De là est même né un mouvement, l’écoféminisme, qui vient converger les deux luttes qui ont comme même combat de se détacher de la domination de l’homme. Bien que ces deux luttes s’éternisent, les gens en sont de plus en plus conscientisés alors il faut continuer de voir la lumière au bout du tunnel et être optimistes, mais surtout continuer d’agir de manière à protéger la Terre, qui est le plus important des communs, celui qui nous rassemble littéralement tous et auquel on peut tous avoir un sentiment d’appartenance. Pour ce qui est des femmes, il serait important de changer les relations qui en découlent; ne plus la voir comme inférieure ou comme une machine à reproduction, à sexe. Il faut complètement reconstruire nos communs en tant que société par rapport à la femme et finalement la voir comme un égal.
À la lumière du cours 3, qui présentait des hypothèses à l’utilisation de la femme comme bouc émissaire, j’ai trouvé ce qu’allait être ma question de recherche.
Parmi les cinq hypothèses présentées, c’est la quatrième qui m’a inspiré pour ma question, celle de la modernité et de la domestication.
NOTES DE COURS
Cours 1 – La représentation de la sorcière
Les communs : il est important de savoir que les communs ne sont pas des choses, mais plutôt les relations qui émergent des choses; un sentiment d’appartenance, une connexion
Cours 2 – le contexte historique et les conditions d’émergence
Qu’est-ce qui a rendu possible l’inquisition?
- La condition anthropologique : l’imagination, la puissance de l’esprit humain, faire exister des choses, passer de l’imaginaire au réel
- Caractère institutionnel : les institutions, instituer (mise en place formelle, culturelle, sociétale, collective, organisation des modes de vie, manière de régler les choses, rituels, rencontres, diffusion de la représentation, légitimation
Ex : église, autorité, pouvoir, institue la religion
- La condition mythologique : interpréter la réalité avec les mythes, Circé et Médée, la femme fatale et l’étrangère qui apporte la magie
- La condition métaphysique : Les dogmes (vérité absolue incontestable donnée par Dieu lui-même) dans la religion chrétienne
Dogme du péché originel : repose sur la liberté humaine à choisir le mal -> responsabilité, culpabilité
Dogme de rédemption : recherche de béatitude, la vérité du bien repose aussi sur un choix
- Le crime de sorcellerie : définition de la sorcellerie comme un crime
Cours 3 – Les hypothèses
Pourquoi la femme était le bouc émissaire de l’inquisition?
- La place importante et grandissante des femmes au Moyen-Âge prend un coup lors du passage au capitalisme
- La lutte de pouvoir Église/État devient Homme/Femme lorsque l’État devient souverain. L’autorité de Dieu est remplacée par celle du père de famille (pater familias). La femme qui était = à l’homme devant Dieu devient soumise à l’homme.
- Fantasme
- Modernité et domestication, avec la science moderne vient le doute systématique de l’info qui provient de nos sens (Descartes, Galilée) et nait la rationalité. Représentations abstraites, création d’un domaine des choses de la nature dans lequel on va ajouter les femmes, objectification du domaine -> femmes assujetties à l’homme