Le hip hop est né comme un outil pour occuper et souder les habitants du Bronx et plus généralement les personnes défavorisées. Mais c’est assez rapidement devenu un outil de résistance face au pouvoir, étant donné que leurs piètres conditions de vie ont été ce qui a poussé ces gens à créer ce mouvement. Le rap, fer de lance du hip hop, devient donc problématique aux États-Unis car il « fait chier » le pouvoir. Le gangsta rap va devenir l’image définitive du rap en ayant finalement une identité parfaitement distincte et une philosophie, un message parfaitement développé. À partir de ce moment-là, le rap va progressivement entrer dans le système américain, comme en témoigne le duel entre Method Man et James Corden. Effectivement, aujourd’hui, aux États-Unis, on peut voir Donald Trump, symbole de l’Amérique profonde et des fortunes Américaine, encenser Lil Pump ou serrer la main à Snoop Dogg. Ce phénomène a donc levé une problématique: Si le rap aux États-Unis est complètement entré dans le système et ne dérange plus, alors pourquoi en France, là où le rap existe depuis au moins 1989, il continue à être marginalisé et continue à susciter des débats? Pour répondre à cette question je vais collecter, à l’instar du travail sur les sorcières, plusieurs morceaux de rap français et vais prélever les paroles pour savoir de quoi ils parlent. Je vais analyser des morceaux modernes car si le rap est encore marginalisé aujourd’hui c’est la preuve que les textes actuels posent encore problème, voir que ce sont les seuls. Une fois que j’aurais trouvé quels sont les thèmes abordés, j’aurai complété mon enquête et il ne me restera plus qu’à analyser les échantillons récoltés pour développer une première thèse qui tentera de répondre à la problématique, puis une antithèse et enfin synthétiser l’ensemble pour trouver une réponse qui considère le plus de facteurs.

Les œuvres collectées sont: Louvre, Alpha Wann, 2018. LRH, Freeze Corleone, 2018. Intro, Doc OVG, 2019.

Paroles de Louvre d’Alpha Wann

Comme d’hab’, le flow est niquel (comme d’hab’)
Le fond est russe, la forme est ricaine
Ces rappeurs du dimanche veulent chanter comme The Weeknd
(Comme The Weeknd)
Vive la part, nique la miette
Je cherche pas ma place, j’demande qui a pris la mienne
Pull up en Davidson, Harley noire,
Parlez d’moi, j’m’en bats les noix
Mon avocat parle hébreu, pas b’soin d’parler noich
À la fin d’un bon film, y’a les keufs qui meurent,
Butés par les thugs niggers
Drug dealers, fonce-dés, blunt, liqueurs
Ces chiennes se battent pour moi, des combats de pitbull
T’es pas Angelina et moi, j’suis pas Brad Pitt, pute
J’suis qu’un négro laid avec des grosses lèvres
Dès qu’j’arrive, les fausses putes s’assoient et les vraies gows s’lèvent

Eh, bienvenue dans mon film, navigue dans mon script
Je sais garder ma langue dans ma poche, ma bite dans mon slip, hein
J’t’apprends à parler, wallaye j’veux un palais royal
Oligarche, money cash, polygame, jolie garce (Don Dada)
Don Dada, ivoire et argent sur toute la chaîne
Ils veulent m’donner un peu d’fromage
Sans m’dire où s’trouve la chèvre
Et l’beurre? L’argent du beurre, la crémière,
Je m’en fous, j’la gère, j’la fourre j’la jette
Fuck une pétasse qu’a du cul
Je préfère une meuf cheum qui a du cœur
Même si elle est moins souple au niveau des adducteurs
J’parle vrai, les faux ont b’soin d’un traducteur
Y’a pas d’Lambo, y’a l’métro, y’a pas d’gun mais y’a l’cutter
(Mais y’a l’cutter, mais y’a l’cutter)

Tu dis qu’t’achètes, en vrai, tu loues, après tu l’ouvres
J’regarde pas c’que fait la concu’, nan
Faudrait qu’on m’prête une loupe
Élevé près d’une louve, j’ai le caractère du loup
Mes nègres iront au musée quand ils vivront près du Louvre

Tu dis qu’t’achètes, en vrai, tu loues, après tu l’ouvres
J’regarde pas c’que fait la concu’, nan, faudrait qu’on m’prête une loupe
Élevé près d’une louve, j’ai le caractère du loup
Mes nègres iront au musée quand ils vivront près du Louvre
Mes nègres iront au musée quand ils vivront près du Louvre
Mes nègres iront au musée, mes nègres iront au musée

Dans ce texte, les éléments que j’ai notés sont « le fond est russe la forme est ricaine » signifie qu’il a des valeurs plus de gauche mais à un paraître capitaliste. « À la fin d’un bon film, y’a les keufs qui meurent » s’explique tout seul. « Ils veulent m’donner un peu d’fromage
Sans m’dire où s’trouve la chèvre » montre qu’il désire sortir du système où il s’y sent inutilement dépendant. « Oligarche, money cash, polygame, jolie garce (Don Dada) » donne un aperçu de sa personne, notamment avec money cash, très américain et polygame, faisant référence à l’Afrique.

Paroles de LRH de Freeze Corleone

Pour le cash on est partant, fait du sale à tous les quart-temps
On les blesse trop, négro vers plus l’infini, l’écart tend
V’là d’flacons quand le groupe lean
Ceinture Gucci, Cortez toute clean
Chen Zen négro, j’découpe comme si j’sortais d’Brooklyn
Dans ma tête: argent, sexe, drogue, complot, c’est obsessionnel
Gangster et gentleman négro, noir et professionnel
Headshot à chaque kill, négro
Gros bout d’caca, j’ai les blocs à Shaquille, négro
J’suis sur Grand Line, j’augmente de niveau à chaque île, négro
Déterminé comme Leicester, killu’ à vie comme Majster
Fft fft, sur la prod j’glisse comme kitesurf
Négro j’suis dans l’complot des détournements d’fonds humanitaires
Par les réseaux pédophiles jusqu’au trafic d’minerais uranifères
Dans leur rétro tellement j’suis loin devant
J’calcule mes trajectoires en fonction d’si y a plus ou moins de vent
Black Jack ravitaille les points de vente
Négro tu roules des ficelles, j’roule des collages
Des génétiques, ou des clonages
Cons’ plus de kérosène que pour 12 décollages
En D1, toi D3, j’regarde le jeu, j’vois des proies
Chen Zen, à propos des lunettes Cartier comme à Detroit
Et négro j’ai les mêmes pills que si j’étais dépressif
Seul découpe comme si j’étais six
Pétasse pour qu’les liasses s’épaississent, ekip

Chaque titre, audio hit, fonscar aux opioïdes
Chen Zen, j’arrive yeuz plissés comme un Tokyoïte
S-o Flem pour les prods et les mix
À Dakar en train d’chercher des licks
Négro j’ai la dalle
Il m’faut l’salaire d’un meneur d’jeu chez les Knicks
Tout pour la secte comme un scientologue, Chen Zen aka LRH
Fuck la salle, j’suis à propos des armes à feu comme la NRA
J’en ai marre d’tous ces négros comme un suprémaciste blanc
J’veux baroder au bled dans une Foreign de vieux raciste blanc
Quand j’débarque, tu m’connais, soit j’apporte shit soit j’apporte gas
Au mic j’crache des flammes, négro j’ai les techniques à Portgas
Dans l’compte j’veux des sommes à 10 O
J’suis comme orque, t’es comme cabillaud
Rital comme Fabio, Galsén comme Sadio
Et j’dors pas à cause du alpraz’
Fusille les CDs comme si j’fais du ball-trap
V’là d’tracks dans la cuisine, j’prépare du sale crack
Tu sais qu’j’ai les manuels, petit
Maîtrise les boîtes auto comme les manuelles, petit
Tu rappes encore, t’as presque l’âge d’Emmanuel Petit
Très loin d’la puissance maximale
Yeuz’ bridés, japonais comme une Maxima
Réflexe de pilotage de taximan (SKRR-SKRR!)
Quand y’a personne dans le rétroviseur, j’aime
Nouvelle école, Freeze Corleone aka Proviseur Chen, ekip

Voici le lien vers la page Genius de ce texte qui explique tous les vers en détail: Freeze Corleone – LRH Lyrics | Genius Lyrics. Mais j’ai noté ici les phrases les plus explicites: « Dans ma tête: argent, sexe, drogue, complot, c’est obsessionnel » Montre un aperçu de sa personne. « À Dakar en train d’chercher des licks », « Réflexe de pilotage de taximan (SKRR-SKRR!) » et « J’veux baroder au bled dans une Foreign de vieux raciste blanc » sont des références au Sénégal, le dernier vient même montrer une opposition avec le blanc. « Chen Zen, à propos des lunettes Cartier comme à Detroit » Ici, l’opulence des lunettes Cartier est décrite comme issue de la culture hip hop américaine.

Paroles de Intro de Doc OVG

Biff, chatte fait tourner l’monde, pour ça qu’ça part en couilles
Fuck le rap, j’suis sur mes ondes, trop d’fufu autour, on les embrouille
Comme les Diaz, j’leur fous des baffes
Lucide au THC, j’vous botte
OVG Doc comme l’eau qui dort
Retour de Sodome et Gomorrhe
F.D.T, han, tu sais qu’c’est la fin des temps
Nomme sacrilège sur la terre des singes, j’prie Dieu pour pas être là quand ça sera la fin
J’travaille dur maintenant pour pouvoir laisser quelque chose à mes gosses
OVG Doc, 667, eh, depuis l’début, on est boss, eh
Demande à McGregor, il va t’dire si insulter la religion ça porte chance
Il aurait pu perdre la vie si ça avait été d’autres circonstances, eh
C’est qu’une question d’bon sens, j’te laisse dire ce que t’en penses, OV, eh
Comme Kaki, j’prends du recul quand j’avance, ok
J’vais plus en cours pourtant j’sens qu’j’en apprends plus
J’ai pris conscience que beaucoup d’entre eux sont des putes et des vendus, eh
Fufu s’plaint d’sa vie d’merde, voit pas qu’il porte des chaînes
Et les négros qui traversent la mer, qui crèvent dans l’eau et l’sel (eh), eh
Y’a longtemps qu’t’avais pas vu des flows comme tels667, Black Pyramide Cartel, skurr
Dans l’champ d’bataille, y’a que des corps, ça pue sa mère, ça sent l’porc
T’as mal parlé, on va t’tordre, pas respecté, t’as eu tort
Bientôt, tout c’que j’touche devient d’l’or
Flow trop trash, flow trop gore
Ferme ta gueule et suit l’rang vu qu’t’es un mouton, eh
Nous comme 39-45, eux comme la Guerre des boutons, OV
J’fais pas du rap conscient, j’prétends pas donner des leçons, eh
J’dis juste la vérité, ma haine est justifiée
Si on vous nique, c’est mérité, quenelle profonde, s/o Dieudonné, eh (s/o)
Viens, on inverse les rôles, fais-nous visiter les pôles
Ça s’voit qu’ils jouent des rôles, c’est seulement 37% d’la communication qu’ça représente la parole
Grande puissance ou pas, les cainris s’sont fait botter par les viet’
Comme eux avec ma secte, sur notre terrain, on va les wet, eh
Ce sont tes yeux qui t’trahissent, celui qui m’guide, c’est Dieu
Ils croient en rien, font des caprices, trop d’entre eux sont vieux
Vendent leur âme pour du khalis
Ils copient mais sont pas prêts, j’écoute leurs textes, ‘sont creux, eh
Tu veux savoir c’que j’pense de toi ? Réécoute « Pieux »

Dans ce texte, chaque vers dit quelque chose d’important j’en ai relevé certains: « Biff, chatte fait tourner l’monde, pour ça qu’ça part en couilles » signifie que l’argent et le sexe, opposés à l’islam, conduiront le monde à sa perte. « J’travaille dur maintenant pour pouvoir laisser quelque chose à mes gosses » montre le côté capitaliste, le désir de s’enrichir mais dans l’intérêt de la famille, c’est d’ailleurs le sujet de son deuxième album. « Fufu s’plaint d’sa vie d’merde, voit pas qu’il porte des chaînes
Et les négros qui traversent la mer, qui crèvent dans l’eau et l’sel (eh), eh » il attaque ici les occidentaux (noirs ou blancs) qui ne réalisent pas la chance qu’ils ont. « J’dis juste la vérité, ma haine est justifiée
Si on vous nique, c’est mérité, quenelle profonde, s/o Dieudonné, eh (s/o) » il dédicace Dieudonné, humoriste antisémite qui tient le même discours. Un de ses sketchs qui illustre parfaitement sa pensée juste en bas (je veux mentionner que je ne cautionne pas les propos énoncés dans ce sketch mais la réalité est qu’ils sont pertinents pour l’enquête):

Au final, les thèmes les plus fréquents sont l’argent, la religion, l’Afrique, marquant une opposition entre des valeurs conservatrices africaines et le libéralisme américain.

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