Plusieurs mouvements de résistance politique qui ont émergé sous le système néolibéral ont tendance à rallier la lutte contre différentes formes de violences instituées. Par exemple, la grève étudiante de 2012 s’appuyait sur des revendications quant à l’accessibilité aux institutions d’enseignement supérieur, mais la rencontre de la police lors des manifestations a permis d’élargir la lutte vers une résistance à la brutalité policière.
Pour ce qui est de la lutte anti-raciste, plusieurs mouvements dénoncent les violences policières motivées par le racisme. Le hip hop est un moyen artistique de faire de la résistance politique. J’ai rassemblé quelques titres qui concernent le combat des personnes noires contre la police : Sound of da Police – KRS-One, Police state – DEAD PREZ, Glory – Common, John Legend, The bigger picture – Lil Baby, Fuck tha police – NWA, Trapped – 2Pac, Twinz – Big Pun, Fat Joe.
L’intérêt de traiter du hip hop comme moyen de résistance politique plutôt que d’un moyen plus théorique est que l’art permet de maintenir les tensions au sein des revendications. Les tensions méritent d’être interprétées. Plutôt que de théoriser le réel, on utilise un point de vue expressif et subjectif pour exprimer les malaises et les paradoxes profonds. Le hip hop permet en quelques sortes de masquer la résistance. On ne peut pas traiter du hip hop de manière abstraite.
Notes de cours
La tension entre le public et le privé chez Dewey
On légitime les transactions et les échanges entre les humains sur la base de cette distinction privé/public.
«la ligne qui sépare le public du privé doit être tracée sur la base de l’étendue et de la portée des conséquences d’actes qui sont si importants qu’elles nécessitent un contrôle, soit par prohibition, soit par promotion.» – Dewey
Rapport entre la vie privée du sujet et ses implications sociales.
Lien à faire avec la police?
Problème de l’apathie politique
Apathie = incapacité d’être affecté, manque de désir, de volonté d’engagement
3 pistes
1- Décalage : entre le contexte actuel et la politique traditionnelle (exemple : colonialisme/souverainisme) ?
2- L’ampleur des interventions : les problèmes sont trop gros en comparaison aux actions que prennent les partis politiques. (inverse aussi vrai? réaction policière exagérée selon la situation?)
3- Recours aux experts : sentiment que la population ne peut pas comprendre les enjeux seule
La non-représentation, la polarisation, et l’interdiction de rêver peuvent contribuer à générer l’apathie politique.
LIBÉRALISME | COMMUNAUTARISME |
– Individu, droit de la personne – Libertés individuelles – Indépendance de la personne – Réussite de l’individu – Neutralité | – Sens de la vie vient du communautaire – Interaction dynamique – Droit = communauté – Débat dans l’espace public – Différences |
Tensions au sein du hip hop
Le mélange des valeurs libérales et communautaristes créent de fortes tensions dans le hip hop. La difficulté réside dans l’interprétation de ces tensions.
Le rapport réel à la vie (vécu) est chargé de tensions, de paradoxes et de contradictions. La démarche explicative rationnelle théorique veut que tout soit logique, le discours du hip hop permet d’exprimer (tensions). Les individus incarnent des conflits sociaux, ils symbolisent les luttes qu’ils portent en eux
Tension entre Intégrationnistes (Martin Luther King) pacifiques et Nationalistes (Malcolm X) violence.
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2022-10-23
Notes de cours
Contexte historique du hip hop
Mouvement de masse
Robert Moses – promoteur immobilier (Express way…)
Années 50 (après-guerre) Capitalisme, urbanisme, rationalisation, progrès techno, marché mondial…
Robert Moses applique des mesures urbaines racistes (- racisme systémique) grâce au pouvoir énorme qu’il détient.
Il apparait nécessaire de s’attaquer à ce pouvoir pour qu’il y ait résistance politique. Le hip hop constitue un mode de lutte qui va réussir à s’attaquer au pouvoir hégémonique.
L’art comme moyen de résistance politique :
- Permet d’exprimer des conflits vécus
- Le message critique peut être dissimulé
- approche différente
- Fait vivre l’expérience
- Identification par le discours artistique
- Artiste visionnaire, permet d’être en avance, voir autrement
- Ressenti
- Refaire tissu social (rassembler)
L’art fait s’agencer des idées opposées (tensions) Ex: beauté-tristesse, liberté-souffrance. Les contradictions internes à la société se retrouvent dans l’art. Rendre beau la violence?
Grandmasterflash and the furious five : rend supportable par la danse, description très réaliste de la lutte contre le système. Impasse : pas de vie communautaire dans le Bronx et pas de société de droit. À la fin de la vidéo, il moque le pouvoir de la police. Le fait de rire de quelque chose de triste permet de faire réaliser la situation ridicule.
Le mythe fondateur du hip hop (1977) permet de construire un imaginaire collectif. Voir le récit de Disco Wiz et Grandmaster Caz
2022-10-30
Qu’est-ce que ça vous dit un tableau de Basquiat?
Les toiles comportent parfois des images troublantes et suscitent des émotions sombres chez moi, mais les couleurs vives donnent une forme de vitalité à l’oeuvre. Je ressens une sorte d’élan de vie, d’affirmation de quelque chose à travers ses peintures. Dans certaines toiles, je remarque différentes représentations de formes de pouvoir que Basquiat tente de déconstruire. Ce qu’on voit à travers son oeuvre provoque, choque et fait grimacer par moments, et par d’autres fait plutôt sourire et s’émerveiller ; toujours, ses toiles permettent de se questionner et d’effectuer une forme d’introspection quant à notre rapport à ce qui est représenté devant nos yeux.
Lecture des textes
Michael Walzer
James C Scott
Notes de cours
Résistance politique : Répondre à un pouvoir violent et coercitif.
Passer par l’art (hip hop) pour surmonter l’impasse de la critique directe du pouvoir.
Théorie du texte public vs texte caché
Public : Ce que les dominés disent en présence des dominants et vice versa
Caché : Ce que les dominés (ou dominants) disent entre eux
Thèse : tout groupe dominé produit un texte caché aux yeux des dominants. Les dominants réfléchissent à l’exercice du pouvoir à l’abris du regard des dominés.
On pourrait imaginer qu’il n’y a pas de résistance politique mais il y en a une cachée.
Comment se fait une révolte ouverte? Ironie, déguiser la critique. Selon JCS, le système a plus à craindre des dominés chez lesquels les institutions de l’hégémonie ont été le plus efficace. Le ressenti du malaise suffit pour déployer une forme de résistance politique. (opposé à la «prise de conscience» marxiste)
La domination et les arts de la résistance
Le problème est la confrontation directe du pouvoir.
L’art permet d’exprimer les tensions (les contradictions qui ne s’expliquent pas abstraitement). On ne peut pas aborder la résistance politique d’un point de vue strictement objectif.
On pourrait se demander pourquoi le hip hop n’arrive pas à se dissocier des stéréotypes au cœur de la misogynie? (être dominé n’empêche pas de créer d’autre rapport de domination)
Seize temps noirs pour apprendre à dire kuei – Philippe Neméh-Nombré
Philippe Neméh-Nombré rapporte un échange entre Robert Hill et Maryse Condé : «À une question de l’historien Robert Hill, demandant si la musique est « le creuset dans lequel la plupart des idées du peuple émergent », Maryse Condé répond : « Pour nous comprendre, les gens doivent nous lire, mais la musique, il faut seulement la sentir.(Clark Vèvè et al, 1989) » ». (Philippe Neméh-Nombré, 2022)
Dans cet essai, l’auteur tente de rallier, superposer, à la manière du mix en seize temps, les solidarités entre les communautés noires et autochtones au Québec. «Le modernité occidentale, comme le monde qu’elle continue de créer sur le continent qu’elle a appelé l’Amérique, doit son existence à la production de l’abjection noire et à la production de l’absence autochtone.» Philippe Neméh-Nombré tente de «réimaginer à partir d’une perspective noire, l’histoire et les possibilités de la rencontre des peuples au delà de la violence coloniale».
«Diana Taylor parle de la théâtralité du scénario de la rencontre coloniale comme d’une formule qui se transporte, se répète, évacue les complexités et encourage le fantasme de la participation – à la violence» (p.23)
«Jacques Derrida dit de la violence fondatrice qu’elle : «est toujours représentée dans une violence conservatrice qui toujours répète la tradition de son origine et (…) ne garde en somme qu’une fondation d’abord destinée à être répétée, conservée, réinstituée» (p.50)
Voir pages 97 et 98 sur l’abolition créatrice.
Entrevue à radio Canada avec Philippe Néméh-Nombré:
« On ne peut pas penser la modernité occidentale, autant son mode de production – le capitalisme et ses grandes tendances philosophiques – comme l’humanisme, on ne peut pas les penser sans l’appropriation des territoires autochtones et sans l’outil conceptuel très important qui est l’esclave noir qui permet d’avoir un point de comparaison. »
(…)
«Ce n’est pas une pratique économique comme une autre, ça devient aussi une pratique philosophique et discursive qui fait en sorte qu’un esclave c’est pas n’importe qui c’est une personne noire. C’est fondamental quand on veut penser la modernité et ses héritages aujourd’hui.»
(…)
« Comment faire pour écrire ensemble. Comprendre nos propres histoire, d’où on vient, à partir de quelle posture est-ce qu’on parle, se regarder soi-même faire un exercice de réflexivité ça permet ensuite d’entrer en relation avec l’autre. »
(…)
«Les liens peuvent se faire à partir du moment où on se ressaisi de nos propres histoires, qu’on comprend la violence vécue et qu’on comprend comment dépasser cette violence là.»
(…)
Philippe Neméh-Nombré parle des premiers esclaves documentés en Nouvelle France (p.41) : En terme quantitatif ça n’a aucune commune mesure avec ce qui pouvait se faire aux États-Unis. À partir du moment où cette structure là existe, est-ce que les personnes noires, les personnes esclavagisées occupent le même rôle dans la société que dans une société où il y en aurait beaucoup plus? La réponse c’est oui. Donc si on veut se décharger de l’esclavage, il faut penser à cette question. L’esclavage a existé ici de cette manière.
(…)
Dans le récit national québécois c’est difficile d’accepter que le fait d’avoir vécu une domination (anglo franco) ça complexifie la capacité à se reconnaitre soi-même comme le groupe dominant par rapport à un autre groupe. On est plus dans le même contexte que celui avant les années 60. C’est difficile aujourd’hui en terme politique économique et culturel que le groupe dominant n’est pas la majorité franco-québécoise. Cette difficulté à identifier les torts causés et les structures qui ont été reproduites et mises en place par ce groupe la ça perdure. Participer à la structure esclavagiste du monde moderne ça ne veut pas nécessairement dire posséder des esclaves, ça veut aussi dire fabriquer des bateaux pour en amener. Une partie de la prospérité économique est liée à la structure esclavagiste mondiale. On participe à quelque chose comme un système. Malaise, opprimé à oppresseur.
(…)
On ne réfléchi qu’en terme de binarité, on est soit oppresseur soit opprimé, soit riche soit pauvre, bon sauf que cette manière de concevoir les dynamiques sociales et les rapports de pouvoirs nous empêchent de voir la multiplicité de ce qui se produit dans notre société. On peut avoir été victime de quelque chose et reproduire cette même chose ou autre chose à quelqu’un d’autre. Le fait de vivre une domination n’empêche pas d’en produire d’autres.
2022-11-04
Retour sur l’exposition Basquiat et la musique
Fond (Message) = GRAS
Forme (technique) = Italique
Critique explicite du racisme
La pratique de Basquiat rassemble la musique, les arts visuels et la critique sociale. Cette toile représente bien la violence de l’affrontement entre un policier armé et quelqu’un qui reçoit des coups. Les traits animés et vigoureux de l’artiste, les couleurs vives et les sons visuellement exprimés amplifie l’effet de violence. (Basquiat et la musique)

L’environnement pluridisciplinaire qui entoure l’artiste est caractérisé par la liberté radicale punk, le rejet de l’abstraction, du minimalisme et du conformisme social. Résistance aux conventions sociales.
Figures de la lutte politique – héro
L’influence du hip hop dans l’art de Basquiat se traduit principalement dans ses toiles par sa manière d’envisager la photocopie – dupliquée, découpée, répétée – comme échantillonnage visuel et dans un rapport à l’échantillonnage des mots et des motifs qui participe à la force compositionnelle de nombre de ses oeuvres.
Citation de Fab 5 Freddy : « La façon dont il vivait faisait partie de son travail et son travail faisait partie de sa vie».
Je trouve que cette phrase évoque bien le fait que l’artiste incarne et vit réellement les conflits sociaux et porte la lutte en lui, qui se reflète dans son travail, dans son art.
L’utilisation des cubes en bois, traditionnellement associés au jeu, à la logique et à la construction, renvoient au génie propre à la musique noire et à sa capacité à élaborer, par l’improvisation, des oeuvres sans fin à partir d’un matériau musical souvent réduit.
Pistes ouverture : superposer, juxtaposer, faire se rencontrer les luttes du mouvement du hip hop (anti-racistes et anti-oppression) avec les luttes décoloniales et autochtones…
Pourquoi le hiphop alimentent toujours des stéréotypes au sein de l’objectivation de la femme?