« Our freedom of speech is freedom or death/ We got to fight the powers that be. »
-Public Enemy « fight the power » (1989)

Dénoncer la discrimination
Le HipHop est fait désormais partie intégrante de la société post-moderne. Il est encré dans la culture artistique et musicale, il se retrouve sur toutes les plateformes de musique, il est inclus dans les galas de remises de prix prestigieux tels que les Grammy’s awards, il fait bouger dans les festival de musiques, il rassemble les gens de toutes générations par sa musicalité entrainante et rythmée et par ses paroles explicites, crues et parfois provocantes. Hors de tout doute, le rap est respecté et admiré par énormément de gens, mais avant d’être à la « mode », avant que l’on s’amuse à chanter les paroles rapides et saccadés entre amis, avant que l’on entendent les chansons de Kanye West et Travis Scott dans les partys de secondaire, avant que l’on emprunte les paroles de certaines chanson pour une photo Instragram, le Rap a une histoire. Le Rap c’est bien plus qu’un style de musique « chill », c’est bien plus qu’une mode éphémère, c’est d’abord et avant tout un cri à l’aide, une manière de dénoncer une réalité inondée d’inégalités, de profilage raciale, de brutalité policière et de discrimination. Le HipHop fait partie intégrante de la culture Afroaméricaine car c’est par cette forme d’art que tous ressentiments, toutes dénonciation, toutes formes de conflits passaient.
Le HipHop était d’abord et avant tout un genre musical que l’on retrouvait dans les communautés noires, particulièrement dans le Bronx, qui était utilisée comme moyen d’expression. Le racisme n’a jamais disparu et les États-Unis n’en font pas exception. C’est ce que leur musique leur permettait d’extérioriser, de montrer au reste du monde, de faire comprendre qu’il faut ouvrir ses yeux, sortir de son confort et ses privilèges de blancs pour voir la réalité qu’ils ont a vivre chaque seconde de leur vie. Étant la cible des policiers, il est difficile pour une personne noire, particulièrement dans les années 60-70, de faire part de son désarroi, d’avoir son mot à dire sur les décisions politiques, de faire preuve de mécontentement et de se révolté sans en subir les conséquences. C’est là que le HipHop devient une porte de sortie, un échappatoire, le synonyme de la liberté à laquelle elle n’a jamais eu droit.

« Les dozens servaient de mécanisme destiné à enseigner et à affermir la capacité à contrôler ses émotions et sa colère : une telle capacité était souvent nécessaire à la survie. » On trouve des éléments montrant que de nombreux groupes dominés ont développé des rituels d’insultes similaires dans lesquels une perte du contrôle de soi équivaut à la défaite.
-James C. Scott, la domination et les arts de résistance
Cette citation met en lumière une pratique qui est devenue culte dans le HipHop et qui a longtemps été un moyen d’exprimer ses démons intérieurs, sa rage sous forme de combat amical, d’un respect mutuel entre deux personnes qui comprennent la réalité de l’autre, une forme de violence par les mots qui est à la fois douce et déchirante: le Rap Battle.

« To be a N**** in this country and to be relatively conscious is to be in a state of rage almost, almost all of the time. »
-James Baldwin, 1961
Pourquoi l’art?
L’art est un intermédiaire utilisé depuis la nuit des temps par les humains pour représenter des sentiments, des visions du monde riches de sens mais parfois trop difficile à extérioriser de manière habituelle/formelle. Il est une porte de sortie pour les artistes qui débordent de ressentiments face à des situations particulières, des expériences, etc… L’art prend évidemment toutes sortes de forme et le HipHop, faisant partie intégrante de la musique, en est une. (raisons énumérées dans les notes de cours).
Voici pourquoi, dans le cas du Rap, l’art est si important :
- Communication des idées des messages plus diversifiés, publics
- Musique : connexion plus immédiate sur l’émotion
- Message plus accessible à la majorité, concentration de l’information
- L’art échappe en partie à la marchandisation et à l’industrialisation
- Moyens techniques plus accessibles
- Plus concret, imagerie mentale, représentation sur l’imaginaire
- Passe par l’expérience personnelle et vécue ce qui humanise le problème et touche notre sensibilité
- Effet de regroupement et de rassemblement
- Universalisation
- Fait tenir les contradictions, les conflits, les tensions ensemble
- Interprétation subjective multiple
- Permet de faire vivre et ressentir des choses à des personnes dont la réalité n’est pas la même, qui échappent de leur expérience personnelle
- Liberté qui va combattre l’inhibition de l’action
- Tire avantage de l’impuissance à agir
Le Hip Hop a permis de faire passer des messages qui passaient souvent sous le radars, il a permit de sensibiliser le reste de la population, ceux qui avaient le privilège (de part leur couleur de peau) de ne pas connaitre la dure réalité du Bronx, des injustices multiples et des quartiers défavorisés. Il a permit et permet encore d’éduquer les gens sur le sujet du racisme et de la discrimination sans le dire explicitement. Le Hip hop envoie également le message aux personnes blanches qu’ils doivent apprendre de l’histoire, qu’ils doivent prendre conscience de ce qu’il se passe hors de leur petit cocon, que tout n’est pas rose. Le HipHop pousse à la remise en question, il nous confronte à des réalités durent à imaginer, à croire mais nécessaire à accepter pour pouvoir avancer.
« Teach the student what needs to be taught/ ‘Cause Black and white kids both take shorts/ When one doesn’t know about the other ones’ culture/ Ignorance swoops down like a vulture. »
– KRS-one, « you must learn » (1989)
Résistance
Deux courants de pensée, deux formes de résistance et de manière de revoir la société sont mises de l’avant par des activistes notamment Malcom X et Martin Luther King. Ces deux grands hommes dirigent deux groupes distincts soit les intégrationnistes et les nationalistes. Lorsque des inégalités se font subit pendant si longtemps et qu’elles sont profondément ancrées dans la société et dans le système politique et judiciaire, il est fréquent que des groupes se forment et se soulèvent éventuellement pour faire part de leur mécontentement ou simplement prendre la parole pour ceux qui ne le peuvent pas et crier à l’injustice. C’est ce qu’on voit apparaitre particulièrement dans les années 60, un peu avant la montée du HipHop avec les deux courants de pensées mentionnés précédemment. Même si la lutte contre le racisme et les inégalités les a tous deux poussés à agir, ces deux groupes se distinguent dans leur manière de régler le problème. En effet, les intégrationnistes ne croient pas en la violence tandis que les nationalistes oui.


Le mur entre les noirs et les blancs
La discrimination et les inégalités se sont accumulées, empilées à travers les années forçant une séparation presqu’infranchissable entre les personne noires et les personnes blanches. Il existe tout de même une relation entre les deux, un rapport de dominant à dominé. Dans ce cas, les blancs qui possèdent le plus de richesses, les belles maisons, les grattes ciels, les infrastructures développées, les services accessibles, sont les dominés, c’est eux qui prennent les décisions, qui ont du poids sur les décisions politiques alors que les noirs, ceux qui sont mis de côté lorsqu’il est question de décisions politiques, ceux qui subissent de la discrimination chaque jour, sont les dominés. Ce qui est intéressant, comme le mentionne James C. Scott dans son texte, le discours des dominants et des dominés changent complètement en présence ou en absence l’un de l’autre. C’est le discours renfermé, celui qui est caché à l’autre groupe qui bouillonne, qui cache les vrais sentiments.
Les blancs et le HipHop

À ses début, le HipHop n’est absolument pas acclamé par la majorité blanche, il est plutôt mal vue et même méprisé. Pourtant depuis maintenant un bon moment, le Hip Hop est apprécié par beaucoup de personnes blanche, il fait même partie de certaines catégories de prix dans des Gala prestigieux originalement réservé aux blancs. Là où il peut y avoir un problème est dans la reconnaissance et la symbolique du rap. Souvent, on ignore l’histoire qui se cache derrière ce genre musical, la souffrance qui est camouflée derrière les paroles et le tempo, on ignore que lorsqu’il n’y avait plus aucun moyen pour se faire entendre le HipHop était là pour sauver les personnes issues des communautés du Bronx par exemple. Maintenant, des blancs chantent les paroles sans comprendre le vrai sens, prononcent le « mot en n » sans réalisé sa violence, certains vont même à se déguiser en de célèbres rappeurs juste pour des partys thématiques dans des fraternités. Un événement survenu il y a quelques années à UCLA en est un bon exemple (D’anjou, 2020) . Les étudiants, majoritairement blancs, ont organisé une soirée thématique Kanye West où tous étaient invité à arriver en tenue vestimentaire de HipHop. Plusieurs portaient des vêtements buggy, s’étaient grossit les lèvres avec un rouge à lèvre spécialement conçu pour cela («lip plumer») et certains avaient même du noir peinturé dans le visage. Les étudiants ont donc utilisé des stéréotypes longtemps utilisés sur les personnes noires et ils ont manqué de respect à la signification même du rap en la réduisant en un party vide de sens et en manquant de respect à ceux qui ont fait grandir cet style musical. C’est dans ces cas comme ceux-ci que l’on parle d’appropriation culturelle et qu’il est important d’être bien éduqué sur le sujet et de faire preuve de vigilance et de respect.