N.B Nos propres enquêtes influencent la connaissance des idées à caractère politique et éthique que nous étudions.
N.B Cette enquête comporte énormément de citations d'écrivains/écrivaines des Premières Nations : la meilleure façon de comprendre cet enjeu est de se nourrir des paroles des gens concernés. Nous devons les écouter. 

[…] la politique de la reconnaissance telle qu’elle apparaît dans sa forme libérale actuelle reproduit inévitablement les configurations du pouvoir étatique colonialiste, raciste et patriarcal que les demandes des peuples autochtones en matière de reconnaissance essaient pourtant de transcender depuis des décennies.

– Glen Sean Coulthard

Avant 1969 : les politiques canadiennes relatives aux « Indiens » prônaient ouvertement l’assimilation

Maintenant : ces politiques sont ancrées dans le vernaculaire de la reconnaissance mutuelle


La dialectique de Hegel situe les relations sociales au cœur de la subjectivité humaine


Notre identité dépend des rapports interpersonnels complexes qui la façonnent


Ainsi, la dialectique du maître et de l’esclave peut être perçue comme normative : elle suggère que la réalisation de soi en tant qu’agent autodéterminé requiert non seulement le fait d’être comme agent autodéterminée, mais également le fait d’être reconnu par une autre conscience de soi qui est elle aussi reconnue comme autodéterminée. Ce serait donc ces processus et échanges réciproques de la reconnaissance qui rendraient possible l’atteinte de la liberté humaine. Voilà pourquoi Hegel insiste autant sur la nature mutuelle des rapports de reconnaissance.

– Glen Sean Coulthard

Mais parce que nos identités se forment grâce à ces rapports, elles peuvent également être déformées quand ces processus n’aboutissent pas. C’est précisément ce que Taylor veut dire lorsqu’il affirme que les identités sont formées non seulement par la reconnaissance, mais aussi par la «non-reconnaissance ou la reconnaissance erronée des autres.

– Glen Sean Coulthard

[…] la logique selon laquelle la reconnaissance est conçue comme quelque chose qui est accordé ou offert à un groupe ou une entité subalterne par un groupe ou une entité dominant, que cette logique donc est vouée à l’échec, car incapable de modifier, encore moins de transcender, l’ampleur du pouvoir qui est en jeu dans les relations coloniales.

– Glen Sean Coulthard

Bien que l’État n’exige plus aujourd’hui que les droits ancestraux soient formellement «éteints» comme condition préalable à un règlement, le but du processus n’a pas changé : faciliter l’«intégration» des peuples et territoires autochtones dans le mode de production capitaliste et veiller à ce que les «visions socioéconomiques» alternatives ne menacent pas le fonctionnement souhaité de l’économie de marché.

– Glen Sean Coulthard

[…] l’État a insisté pour que toute accommodation institutionnelle de la différence culturelle autochtone soit compatible avec une seule forme politique – à savoir la souveraineté de l’État colonial – et un seul mode de production – à savoir le capitalisme.

– Glen Sean Coulthard

Propriété privée = principe d’exclusion anti-nomique à la conception autochtone du territoire

Les revendications des différentes nations appellent au partage du territoire.


Notre langue est porteuse de précieuses informations

sur notre histoire et ce que nous sommes. Rétablir

nos toponymies va nous révéler les lieux que nous

habitions et nous aider à les réintégrer.

-Frère Oji-Cri

Mais lorsque, comme moi, on appartient à un peuple minoritaire dont la langue et la culture, menacée d’extinction, ont été la cible d’une politique d’éradication, faire acte de présence est déjà un geste de désordre politique.

– Joséphine Bacon
Un documentaire sur la vie et l'oeuvre de la poète Joséphine Bacon – Le  Vecteur : le blogue

désordre = pas une notion innue

Respecter l’équilibre de leur demeure naturelle est nécessaire à leur survie

Innus savent que « venir troubler l’ordre naturel » aura des conséquences


Le désordre, chez les Premières Nations, a vraiment commencé avec la sédentarisation.

– Joséphine Bacon

Quand ils ont construit les pensionnats pour que nous apprenions à lire et à écrire, ils ont tué le nomadisme, ce qui en retour a tué le territoire, parce que la région a vu venir des gens qui cherchaient des limites.

– Joséphine Bacon

De l’âge de 5 ans jusqu’à mes 19 ans, au pensionnant indien près de Mani-Utenam, j’ai appris les outils qui me permettent aujourd’hui d’exprimer ce qu’on a voulu faire taire en nous. Tout en voulant m’acculturer, on m’a donné les armes pour défendre ma culture. C’est le paradoxe de la sédentarisation.

– Joséphine Bacon

Nous avons longtemps été dépossédés de notre parole puisque les livres écrits sur nous étaient toujours signés par d’autres.

– Joséphine Bacon

Respect des ainés = très important


L’institution est-elle prête à lire un auteur sans considérer ses origines ?

– Joséphine Bacon

Je rêve d’une relation juste, de respect, d’égalité. J’écris pour qu’on nous reconnaisse comme dépositaires d’une grande culture au même titre que les autres culture et pour que nos valeurs viennent enrichir la part commune de notre humanité. « Innu » signifie « être humain ». Je m’appelle humain. Je suis une poète de l’humanité.

– Joséphine Bacon

Du même coup, le Blanc a voulu tuer notre culture indienne en même temps que notre langue indienne.

– An Antane Kapesh
Je Suis Une Maudite Sauvagesse = Eukuan Nin Matshimanitu Innu Iskueu by An  Antane Kapesh

Et vous, les Indiens, comment gagnerez-vous votre vie à l’avenir, pensez-vous ?

– An Antane Kapesh

Je ne vous permettrai pas de vivre des animaux indiens.

– An Antane Kapesh

Le saumon, celui qu’il suffisait d’attraper pour vivre, ils devaient désormais le vendre pour survivre.

– Éric Plamondon dans son roman Taqawan

Inquiets que les Eeyou (Cris) soient convertis au protestantisme plutôt qu’au christianisme, des Obats commencent à évangéliser cette nation en 1922, trente ans après que les missionnaires anglicans aient élu domicile près des Eeyou.

Les nations autochtones ont été des pions dans la quête du pouvoir au Canada (Français vs Anglais) et ce, jusqu’à récemment. Nous n’avons qu’à penser aux événements qui ont eu lieu à Restigouche en 1981.


Le Blanc n’a pas parlé de cela à l’Indien. Ce qu’il ne lui a pas dit, c’est qu’il voulait tuer notre culture à notre insu, il voulait tuer notre langue à notre insu et il voulait tuer notre territoire.

– An Antane Kapesh

La construction des barrages hydroélectriques et des réservoirs ont été construits sans tenir compte des communautés autochtones résidant dans ces régions. Dès la première moitié du 20e siècle, ces installations ont touché plusieurs régions.

Des lois et des règlements restreignent la liberté des Autochtones. Des encadrements législatifs existent sur la chasse, la pêche et le piégeage.

Exemple : Restigouche 1981

Crise du saumon de Restigouche : les Micmacs bafoués dans leurs droits  ancestraux
Les événements de Restigouche par Alanis Obomsawin - ONF

À mon avis, aujourd’hui c’est plutôt à nous qu’il revient de prendre la parole dans les journaux et à la télévision parce qu’ici, dans notre territoire, il n’y a aucun Blanc qui sache mieux que l’Indien comment les choses se passaient avant l’arrivée du premier Blanc dans le Nord.

– An Antane Kapesh

Et puis d’occuper le territoire, t’sais, parce que là, on occupait le territoire, mai on était à… sur le chemin des compagnies forestières, sur le chemin de l’Hydro-Québec, sur le chemin des compagnies minières. Il fallait nous… nous tasser. Il fallait nous exclure.

– Richard Kistabish, nation anishnabe

Il est très difficile pour un peuple d’avoir la moindre perception de l’histoire, quand tant d’éléments de cette histoire ont été bannis hors de sa vue.

– Jim Harrison

À aucun moment dans notre histoire, le fossé entre la perception du public et la réalité n’a été aussi grand. L’histoire des peuples indiens est encore souvent enseignée comme si tous ces gens étaient morts.

– Jim Harrison

L’univers doit être envisagé de l’intérieur vers l’extérieur.


L’exercice de pensée de Rawls repose sur la supposition que le problème posé ait une solution.

Cette théorie de la justice n’est pas universelle et possède un caractère occidental.

Dans sa théorie, Rawls inclut le droit de propriété personnelle dans les libertés fondamentales. Dans la conception autochtone du territoire, la notion de propriété privée n’existe pas.

À noter : le mot liberté est mentionné de nombreuses fois dans l’extrait du texte Théorie de la justice.


On m'a demandé quel était le plus beau mot de la langue française. Le voici
Liberté.
C'est un mot qui n'existe pourtant pas dans ma langue. La liberté est un concept intrinsèque à tout ce qui existe dans notre vision du monde. Nous sommes issus d'un espace sans clôtures, sans frontières. Des êtres libres dès l'enfance, dès que le petit devient autonome. Même les animaux, on ne les capturait pas pour en faire un élevage. C'est un état qui n'a jamais eu besoin d'être nommé.
La seule manière de dire la liberté en innu-aimun c'est en nommant la fin d'un enfermement.
Apikunakanu.

Extrait du roman Shuni de Naomi Fontaine

https://ici.radio-canada.ca/ohdio/premiere/emissions/plus-on-est-de-fous-plus-on-lit/segments/entrevue/129753/naomi-fontaine-une-heure-innue-vie-bio

Belle entrevue avec Naomi Fontaine!

Naomi Fontaine — Wikipédia

La réserve est un lieu, imposé par le gouvernement.

La communauté est ancienne, intrinsèque chez les Innus.

Il n’y a rien de bon qui peut sortir de quelque chose qui enferme.

(Naomi Fontaine dans son entrevue)


Être colonisée, lorsque l’on vit dans un milieu où on est minoritaire, implique forcément être polie.

– Naomi Fontaine, Shuni

Je laisse le territoire m’éparpiller comme les oiseaux migrateurs savent pas se perdre.

– Marie-Andrée Gill

Le dehors est la seule réponse que j’ai trouvée au dedans.

– Maire-Andrée Gill

Je me souviens que lorsque nous avons reçu Marie-Andrée Gill dans notre classe (zoom) à la dernière session, elle nous a expliqué n’être guère partisante de l’appellation « poète de l’autochtonie ». Cette pensée rejoint celle de Joséphine Bacon lorsqu’elle se demande si l’institution est prête à lire un auteur sans considérer ses origines. La poésie est tellement sensible, humaine, que les poètes sont avant tout des poètes de l’humanité (pour reprendre les mots de Bacon).


Je rêve d'un territoire partagé, sans frontières. Je rêve d'une Histoire différente, où le sol ne serait imbibé du sang des peuples qui étaient déjà ici, depuis des milliers d'années. Je rêve que le mot Liberté, comme en Innu, n'ait même pas besoin d'exister, car intrinsèque à la vie. Je rêve que nous redonnions à la terre ce que nous lui avons pris. Je rêve d'une communauté où aider son prochain n'est pas sujet à débat. Je rêve d'un Québec qui n'a pas été construit sur un génocide. Je rêve que nous soyons humains. 

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