Leçon 1

Il s’agit d’un premier aperçu concernant ce que nous développerons comme réflexion.

Les extraits de textes de Colette Arnould, Armelle Le Bras-Choppard, Silvia Federeci et Mona Chollet nous permettront de réfléchir le rapport que nous entretenons avec la figure de la sorcière. Car en fait, quelle signification donner à cette construction sociale occupant notre imaginaire dès l’enfance? Celle que lui prête l’industrie du divertissement? Celle qui relève de l’engagement politique et qui depuis les années 70 a pour but la transformation de nos sociétés? Une signification ancienne, mythologique et écologique? Celle issue de la conception de l’Église ou celle comprenant l’assujettissement de la femme grâce à la loi.

Une capsule vidéo
éditée par France Culture
avec Mona Chollet
résume très bien ces enjeux:
La sorcière icône féministe.

Afin de mener nos enquêtes, nous devrons concevoir une méthode permettant d’éclairer le rapport entre les faits et leurs significations, l’importante distinction entre ce qui est public et privé, notre aptitude à évaluer à partir du contexte qui est le nôtre ainsi que le rapport entre l’individu et le social. Une méthode ayant pour but de nous placer en situation d’expérience, autrement dit de favoriser la possibilité d’éviter les écueils du dualisme opposant la théorie et la pratique. Comme le montrera la seconde leçon, nous aurons aussi besoin de comprendre les enjeux relatifs au problème de la représentation. Une problématique riche et fascinante qui nous aidera à réfléchir, tout au long de la session, sans perdre de vue les effets de l’imagination sur la construction du réel, la vie affective, l’éthique et le politique, ainsi que la constitution de nos propres certitudes.

Notre première lecture aura pour but de chercher à comprendre les conditions imaginaires, sociales, religieuses, politiques et juridiques ayant favorisé la création du crime de sorcellerie par lequel l’Inquisition condamnera des hommes, des femmes (80 %) et des enfants au bûcher. Nous nous intéresserons aux possibles liens à faire avec la transformation des manières de penser en comparant l’attitude mythologique, la science aristotélicienne et la science moderne. Nous nous demanderons quelles fonctions auront le Diable et l’Hérétique dans la lente évolution de la figure de la sorcière? Ainsi que la façon dont se déclineront les rapports entre le pouvoir religieux et celui de l’État?

Cette histoire de la sorcellerie (de l’antiquité grecque jusqu’à aujourd’hui), présentée par Colette Arnould, nous aidera donc à nous situer dans le temps, à mieux saisir les différents contextes historiques pour esquisser la transformation religieuse de la société occidentale mais aussi l’avènement de la modernité politique impliquant les notions de droit, de souveraineté, de sujet, et de patriarcat.

La question fondamentale
qui nous intéressera
consistera à nous demander :
Comment arrive-t-on à croire en l’existence
de choses qui n’existent pas?

À bien y regarder nous constatons qu’il y a banalisation de la figure de la sorcière, comme s’il n’y avait pas de continuité entre l’utilisation de cette image et les horreurs de l’Inquisition. Or ces enjeux prendront une toute autre dimension à partir des années 1970 où la réappropriation de la figure de la sorcière coïncidera avec les mouvements féministes.

Une relecture de l’histoire s’imposera car comment expliquer que la répression des sorcières puisse correspondre avec la séparation des pouvoirs entre la Religion et l’État? Que l’Inquisition soit contemporaine des processus d’émergence d’une pensée rationnelle du point de vue de la modernité? Contemporaine aussi de la question du sujet et de l’autonomie individuelle? Contemporaine de l’Humanisme de la Renaissance? Mais aussi de l’avènement du capitalisme.

Nous développerons différentes hypothèses car il est difficile de comprendre pourquoi la femme sera, d’une part visée par une extrême violence physique découlant de représentations fantasmées et d’autre part exclue des modes de protection assurée par le droit.

Tirée du texte d’Armelle Le Bras-Choppard, notre première hypothèse concerne la place des femmes dans l’espace social de la féodalité, la seconde renvoie aux conséquences relatives à la lutte de pouvoir entre l’Église et l’État. Troisièmement, c’est à l’hypothèse de l’auteure concernant la hantise de la lubricité et les effets des fantasmes des démonologues que nous nous intéresserons. Par la suite nous aborderons l’hypothèse de Sylvia Federici inspirée par sa relecture du marxisme et du problème de la rationalisation capitaliste. Pour finalement questionner l’idée que la souveraineté des états modernes, telle que théorisée par Jean Bodin, ne serait pas étrangère à la répression.

Au moment de nous réunir en atelier, nous nous inspirerons d’extraits du livre de Mona Chollet intitulé Sorcières, la puissance invaincue des femmes, afin d’explorer cet imaginaire social et culturel dans un jeu de concept original.

EXERCICE

Commencez une médiagraphie personnelle en cherchant des images, des vidéos, des entrevues ou des textes sur Internet susceptibles de nous aider à mener l’enquête.

4 Replies to “Regard sur la figure de la sorcière, ses liens avec l’État moderne et le féminisme”

  1. Mona Chollet affirme que la majorité des femmes victimes de la persecution durant la Rénaissance étaient les célibataires, les veuves, les vieilles femmes, donc «les femmes qui n’étaient pas sous le contrôle d’un homme ». Cela me dit simplement que le monde et plus spécifiquement la figure de la femme doivent être en accord avec la vision de l’homme et avoir une utilité pour ce dernier. Tout ce qui sort de l’image créée par l’homme n’a pas de place dans la société et donc doit être vilipendé, d’où la figure de la sorcière. La sorcière n’est, en fait, que la femme qui prend du contrôle et affirme son pouvoir dans une société qui ne le lui accorde pas. La sorcière n’est qu’une femme libérée. La patriarchat s’est donné le droit de «discipliner» les femmes afin de leur communiquer un message précis condamnant toute recherche de pouvoir, de liberté ou de contrôle.

  2. Il y a pas de doute qu’à cette poque l’homme voulais garder son pouvoir envers les femmes et donc faire règner le patriarcat. Alors ils « s’attaquaient » beaucoup plus au femmes qui désobéissaient l’Église. Beaucoup de femmes ce sont fait traiter de sorcière pour des gestes banales. Ils y avait même un moyen d’indiquer les sorcière: si elle avait « la marque du diable » (qui pouvait être un simple grain de beauté). Tout ça apportait un climat de peur pour espéré que les femmes comprennes que c’est mal , c’est ce que voulait la société.

  3. Il est évidant qu’à cette époque, les hommes de raison, ne désiraient pas perdre leur pouvoir sur les femmes en partageant le savoir avec elles. Aveuglés par leur égo, ils n’étaient pas en mesure de permettre à celles-ci d’être à l’encontre des lois de l’Église. L’homme de pouvoir soumis à la religion, la sagesse de Dieu, autant dans ces écrits que son imaginaire cachait derrière sa foi la rationalité des actes des femmes, pour les mettre à mort sans avoir à les craindre un peu plus.

  4. En terme de tout ce qui nous entoure concernant nos croyances, il est important de se rappeler que ces croyances sont des choses qui sont propres à chacun ; il s’agit également d’une façon pour nous de se rassurer quant à une réalité. Si nous pensons premièrement aux justifications qui étaient données par rapport aux phénomènes du mal dans l’époque ou le christianisme rageait à nos portes, il n’est pas étomant d’en venir à la conclusion que même si une chose nous semble troublante ou irréaliste, si celle-ci nous permet d’expliquer un comportement, notre cerveau ne s’y détachera pas. Le phénomène des sorcières, qui étaient précédemment prénomée les magiciennes dans l’antiquité, était quelque chose d’effrayant pour les hommes. En effet, ceux-ci craignaient les magiciennes dû à leur pouvoir… Ces mêmes magiciennes se feront alors surnommées les sorcières un peu plus tard et leur perception sera alors sâlie et beaucoup plus négative avec l’immersion du christianisme. À cette époque, nous pouvions être considérées comme des sorcières par de simples actions : dénoncer un voisin, ne pas se confondre au patriarcat ou au modèle familial de l’époque. Les persécutions se font primordialement au sein des femmes veuves, des célibataires, les vielles femmes ; toutes celles qui pourraient ne pas être utile dans le pouvoir partiarcal. En terme d’explication, nous disions donc que ces femmes étaient des sorcières afin de pardonner leur action et d’offrir un sens à ces tortures. Les pendaisons et les crèmations étaient performées dans l’espace public en réflétant un effet disciplinaire sur les autres femmes, les mettant alors dans un climat de vie de peur.

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